Les scènes écoresponsables : quand notre milieu culturel adopte de bons réflexes
Il existe, dans le milieu culturel du Québec, une accréditation nommée « Scène écoresponsable » qui met en lumière, depuis plusieurs années, l’engagement des salles de spectacle en matière d’écoresponsabilité en leur attribuant une accréditation valable pour une période de deux ans. Cette accréditation, remise par le Conseil québécois des événements écoresponsables, témoigne des valeurs d’engagement envers l’environnement, de plusieurs diffuseurs culturels.
...Parmi les membres de Culture Capitale-Nationale et Chaudière-Appalaches, huit scènes se sont vues octroyer cette accréditation. Ose média a discuté avec deux d’entre elles afin d’en connaître un peu plus sur leur vision et gestes en lien avec cette accréditation.
Tania Massault, codirectrice par intérim de la Maison de la littérature et responsable de la promotion et des partenariats privés, explique qu’obtenir une telle accréditation est aussi un projet qui renforce et engage une équipe autour de valeurs communes. Elle souligne également que l’Institut canadien de Québec – qui gère la Maison de la littérature – est un acteur important du milieu culturel et qu’il semblait ainsi naturel que ses projets soient pensés en prenant en compte les enjeux de développement durable. Obtenir l’accréditation était ainsi pour eux une démarche structurante au sein d’un processus plus large de transition écologique de l'ensemble de ses activités. « Depuis 2022, l'équipe de la Maison de la littérature, qui gère également le festival Québec en toutes lettres, procédait déjà à la classification en gestion responsable d’événement pour le festival. Nous avions envie d'appliquer une partie de ces bonnes pratiques à l'année pour la scène de la Maison. La majorité des actions était déjà en place, mais le fait de passer une accréditation permet de consolider les pratiques. D'une part, elles sont ainsi validées par une tierce partie et d'autre part, cela forme l'ensemble du personnel sur les nouvelles normes souhaitées. »
Le Vieux bureau de Poste, quant à lui, a reçu sa première accréditation Scène écoresponsable en 2021, au sortir de la pandémie. « Durant cette période où nos activités de diffusion étaient restreintes, l'équipe a pu prendre du temps pour réfléchir à ses méthodes de travail et amorcer des transitions. C'était le moment parfait pour débuter cette démarche, qui nous avait été proposée par l'équipe du Conseil québécois des événements écoresponsables (CQEER). Cette accréditation nous donnait des barèmes clairs et une ligne directrice à suivre pour améliorer notre empreinte environnementale. », explique Laurie Copeman, chargée du dossier de l’écoresponsabilité au Vieux Bureau de poste.
Prendre le temps de faire l’état des lieux : Tania Massault en souligne également l’importance afin de savoir ce qui est fait en matière d’écoresponsabilité, mais aussi ce qui doit et ce qui peut être fait. « La démarche oblige à faire un 360 degrés de nos activités et de leurs impacts. Pour notre part, nous avons pu confirmer que, pour une scène comme la nôtre, le plus grand facteur d'émission reste le transport. Nous avons donc beaucoup travaillé autour de la mobilité de nos artistes, de notre public et de notre équipe par des incitations au transport au commun et au transport actif. De plus, nous colligeons les transports en avion des artistes québécois et de l’équipe pour les compenser. Dans le cadre d'une autre démarche complémentaire nommée MobiliSENS et gérée par CoopCarbone, nous avons pu procéder à un important sondage sur la mobilité de notre public. Force est de constater que nous avons d'excellents résultats pour la marche à pied. Un "avantage" dû à notre emplacement particulier dans le Vieux-Québec. Cela démontre aussi que les pratiques doivent aussi s'ajuster à la réalité terrain de chaque lieu. ».
De son côté, le Vieux bureau de Poste se distingue particulièrement dans les catégories « Alimentation », « Énergie et ressources » et « Engagement social » de cette accréditation. Mais, des trois, la catégorie qui a le plus fort impact est définitivement la troisième, soutient Laurie Copeman. Comme leur mission est de de faire rayonner les artistes de la relève, il s’agissait qu’un secteur où plusieurs actions avaient été mises en place depuis plus de vingt ans. Durant les dernières années, l’équipe n’a pas chômé non plus! « Nous avons réalisé plusieurs projets qui nous ont permis de rejoindre des clientèles pour qui la culture est moins accessible. Que ce soit avec les personnes âgées, les personnes handicapées ou les jeunes, les projets ont donné lieu à des moments très touchants et remplis de fierté et nous ont permis d'avoir une plus grande implication dans notre communauté. Il s'agit assurément d'un volet de la diffusion écoresponsable que nous souhaitons conserver et poursuivre à développer. », nous dit Laurie.
Réflexes : construction et déconstruction
S’engager dans une démarche écoresponsable demande un investissement de la part des équipes en place et nécessite quelques transformations quant aux façons de travailler au quotidien : sur ce point, nos deux interlocutrices sont tout à fait d’abord. Réduire les imprimés, réutiliser du matériel, penser à la mobilité du public: les réflexes se sont aiguisés au fil des années. « Notre façon de travailler a évolué, nous pensons plus sur le long terme et réfléchissons davantage aux impacts de nos actions. Nous avons dû défaire quelques anciens réflexes et nous en avons intégré de nouveaux. L'équipe s'est notamment tournée vers des outils de travail numériques plutôt qu'imprimés, ce qui a réduit considérablement notre consommation de papier. Le public a également été témoin de cette transition, car nos outils de promotions imprimés ont grandement diminués, laissant plus de place aux infolettres électroniques et à des codes QR, qui permettent de consulter différentes informations dans la salle », donne en exemple Laurie Copeman du Vieux Bureau de Poste.
Du côté de la Maison de la littérature, les réflexes deviennent des habitudes : les critères de durabilité influencent de plus en plus les choix, qu’ils concernent les productions ou la promotion. Les principes de sobriété numérique sur leur site web sont mis en place et le personnel travaille notamment à faciliter la mutualisation de matériel. « Du côté administratif, ajoute Tania Massault, la plupart de nos ententes comprennent maintenant une clause écoresponsable. Cette démarche est aussi sociale et inclusive. L'idée, c'est d'accompagner nos partenaires pour trouver des solutions ensemble. En fait, le mot-clé, c'est bien réflexe. Dans tous nos projets, nous nous posons maintenant la question de l'impact et cherchons des solutions pérennes. »
Petite ombre au tableau : des financements pour la reconnaissance des événements écoresponsables ont été coupés en février dernier. « Il faut savoir qu’auparavant, les organisations pouvaient faire attester leurs pratiques selon la norme BNQ 9700-253. Depuis février 2025, le Bureau de normalisation du Québec a toutefois mis fin à ce programme de certification. Le milieu se trouve ainsi sans aucun programme de reconnaissance adapté. », soutient Caroline Larocque, chargée de projets en transition socioécologique pour le Conseil québécois des événements écoresponsables (CQEER) et pour le Réseau des femmes en environnement. Depuis cette annonce, nous explique-t-elle, le CQEER travaille à la mise en place d’un nouveau programme de reconnaissance pour les événements écoresponsables: « Le lancement officiel est prévu au courant de l’année 2026. Ainsi, il sera bientôt possible de faire reconnaître son événement selon ce nouveau cadre. »
Nos membres accrédités en 2025
Grand Théâtre de Québec, Québec| Argent
Théâtre Petit Champlain, Québec | Platine
Vieux Bureau de Poste, Lévis | Argent
Ceux accrédités depuis 2024 (pour 2 ans)
La Caserne (Les Gros Becs) : Argent
La Chapelle Spectacles : Or
Maison de la littérature : Bronze
Périscope : Or
Premier Acte : Or