Laurence P Lafaille : se passionner pour la création jeune public
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Laurence P Lafaille : se passionner pour la création jeune public

Notre équipe est allé à la rencontre de Laurence P Lafaille, fondatrice et codirectrice de la compagnie de théâtre Les Incomplètes. Artiste multidisciplinaire, elle se sert du jeune public, et même du bébé-spectateur, comme moteur de recherche et de création.

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Publié le : 6 février 2019

Notre équipe a la chance de rencontrer des amoureux et des amoureuses des arts de la scène. Des personnes vraiment intéressantes qui nous font découvrir l’univers du spectacle d’un oeil différent. Parce qu’il est impossible de tout écrire, on vous invite dans notre conversation en vous offrant de les écouter!

Le premier contact de Laurence P Lafaille avec la création théâtrale pour l’enfance et la jeunesse aura été fulgurant. Un coup de foudre qui allait marquer sa démarche artistique de metteure en scène, dramaturge et interprète. Aujourd’hui, cette artiste multidisciplinaire se sert du jeune public, et même du bébé-spectateur, comme moteur de recherche et de création.

Notre équipe est allé à la rencontre de Laurence P Lafaille, fondatrice et codirectrice de la compagnie de théâtre Les Incomplètes. Elle a joint cette année l’équipe du Mois Multi – Festival international d’arts multidisciplinaires et électroniques(1) à titre de commissaire de la programmation du volet jeune public.

Un public fasciné et fascinant

«À l’adolescence, j’étais impliquée dans un projet de théâtre à l’école secondaire. Et nous étions allés voir un spectacle de Serge Marois(2) qui s’adressait aux enfants à partir de 10 ans. Je me souviens très bien d’avoir été absolument renversée de réaliser qu’on pouvait parler à une salle remplie d’enfants avec énormément de pertinence, de gravité et de poésie; qu’on pouvait aborder des sujets aussi difficiles que la mort.»

Dès lors, Laurence P Lafaille s’est intéressée à l’univers du spectacle jeune public. Au fil de ses études en théâtre, elle découvre les démarches d’artistes et de compagnie de théâtre bien établis en dramaturgie jeunesse, allant même jusqu’à devenir bénévole à l’accueil pour le Théâtre jeunesse Les Gros Becs. La réaction des enfants l’émerveille continuellement, mais «c’est surtout leur capacité de contemplation complètement hallucinante» qui la fascine.

Une conversation avec les enfants

Selon elle, le regard particulier que pose l’enfant envers l’oeuvre qu’on lui présente est non seulement très précieux pour l’artiste, mais devient presque une source d’inspiration. La «grande qualité de la création jeunesse repose sur l’aller-retour constant que fait l’artiste entre son oeuvre et le public. Cela lui permet d’arrimer sa vision du monde, son message et ce qu’il a besoin d’exprimer aux caractéristiques des différents publics jeunesse (catégorie d’âge, type d’activité, durée de la représentation, etc.). L’artiste doit trouver la façon la plus pertinente pour parler à son public avec le plus d’acuité possible», explique-t-elle.

Par ailleurs, la portée d’un spectacle jeune public est beaucoup plus vaste qu’on pourrait le croire. Le jeune spectateur, qu’il soit très petit ou à l’aube de l’adolescence, ne vient jamais seul. Cela influence inévitablement le travail de l’artiste et lui amène un défi de création supplémentaire pour que son oeuvre soit aussi forte pour l’enfant que pour l’adulte qui l’accompagne.

Au-delà du spectacle, la rencontre

Tel un petit oiseau sur le bord d’une fenêtre, Laurence P Lafaille est témoin de moments privilégiés, de regards lumineux et de sourires bienveillants. «Ce qui m’étonne toujours et me ravit complètement», précise-t-elle d’emblée, «c’est de voir dans un spectacle un parent être surpris par son enfant, par sa manière de recevoir une œuvre. Je vois des adultes poser un regard émerveillé sur leur enfant : cet enfant habituellement bien grouillant qui est d’un calme absolu devant l’imaginaire qu’on lui propose. J’aperçois très souvent des regards complices que s’échangent parents et enfants pendant un spectacle, parce que quelque chose les a fait rire.»

Pour Laurence, cette rencontre par l’émotion devient possible en création jeune public. «C’est d’une richesse incroyable et je pense que cela contribue à créer des liens entre les adultes et leurs enfants. Le fait qu’on soit dans l’imaginaire, on est dans l’émotion esthétique. On se retrouve dans une émotion qui est produite et qui est en représentation à l’extérieur de nous. Et pourtant, cela nous parle de manière très intime.»

«C’est super beau de voir ça. De plus, il faut savoir que la création jeune public est une belle manière d’amener les adultes vers la création contemporaine par le regard de l’enfant. Comme commissaire au Mois Multi par exemple, j’ai envie de présenter des œuvres plus audacieuses, parce que les adultes ne seraient jamais allés les voir par eux-mêmes. Il ne faut pas oublier qu’ils vont au spectacle pour leurs enfants et qu’ils sont prêts à payer pour ça. Mais ils vont vraiment vivre eux aussi une belle expérience de spectateurs.»

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(1) Mois Multi – Festival international d’arts multidisciplinaires et électroniques.
(2) Serge Marois : Auteur dramatique. (Source)

 

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